Lost your password? Please enter your email address. You will receive a link and will create a new password via email.

What is the capital of Tunisia?

Please type your username.

Please type your E-Mail.

Please choose the appropriate section so the question can be searched easily.

Please choose suitable Keywords Ex: question, poll.

Type the description thoroughly and in details.

What is the capital of Tunisia?

De « je suis » à « ch’u » ?

Comme Laure l’a commenté, l’expression est fautive, et oralement (lorsque l’enfant commence à parler, ou lorsqu’on l’imite intentionnellement) on prononce le i.

Le ‘glissé’ du je vers le ‘cheu’ semble naturel, la dégradation de l’articulation du je donnant un [ʃ].

Je l’ai trouvé écrit au moins deux fois : cela ressemble beaucoup à un posture ‘comique’, à une envie de se démarquer en exagérant une expression d’origine enfantine, une sorte de régression symbolique dont je laisse le monde psy débattre.

Cela ne ressemble pas du tout à une évolution grammaticale, mais à une mode passagère, un argot ultra minoritaire.

Le “Chu” est très utilisé dans le langage oral de type familier, surtout au Québec.

Cependant, il n’y a aucune façon de l’écrire correctement, puisque c’est considéré comme grammaticalement incorrect.

Edit: en cherchant sur d’autres forums, j’ai trouvé la chanson “Lindberg” de Robert Charlevois
(paroles ici)

Alors chu reparti sur Québécair, Transworld, Northern, Eastern, Western pis Pan American!
Mais ché pu où chu rendu

On dirait bien que j’utilisation en “chu” peut bien s’écrire de cette manière!

Il s’agit d’un raccourci de prononciation. À l’oral, on a tendance à manger des syllabes pour aller plus vite. C’est particulièrement flagrant sur les expressions employées fréquemment, comme “C’est pas” qui devient “C’pas” ou “Je sais” qui devient “J’sais”. Dans le cas de “Je suis”, voici le cheminement :

Je suis
J’suis

Le “e” est le premier à disparaître. Cette forme est assez populaire, même à l’écrit (dans un registre familier).

Chuis / Chui / Ch’ui / …

Le [ʒs] dérive naturellement vers [ʃ], car assez proche et plus facile à prononcer.

Ch’u / Chu

Sans doute parce que le “i” vient après le “u”, ou parce que [ʃu] est plus facile à dire rapidement que [ʃi] (c’est subjectif…), on ne garde que le “u” pour une forme très raccourcie.

Ch’

Le stade ultime, qui n’est presque plus compréhensible.

Ch’pas d’accord
Ch’malade depuis hier

Concernant la popularité : j’utilise plus la forme “Chui” que “Chu”. J’entends également plus de “Chui” que de “Chu”, mais cela relève sans doute des parlés locaux. Quant à la forme “Ch'”, je l’entends surtout parmi les adolescents (collégiens et compagnie).

Il y a deux évolutions de prononciation séparées, là : d’un coté la fusion des consonnes initiales de je et suis ; de l’autre la fusion de la semi-voyelle et de la voyelle de suis.


Le premier phénomène est -comme tu le mentionnes- facile à expliquer : le schwa de je s’élide et le son /ʒ/ devient /ʃ/ par assimilation régressive. Le résultat, ch’suis, débute par un groupe de consonnes difficile à prononcer et est donc simplifié d’abord par la palatalisation de /s/ en /ʃ/ (ch’chuis) puis par la réduction de la consonne double en consonne simple (chuis).

En API (et avec mon accent belge) ça donne :

/ʒœswi/ --> */ʒswi/ --> */ʃswi/ --> /ʃ:wi/ --> /ʃwi/

C’est un phénomène qui s’applique à tous les verbes qui commence par un s (je sais – chais ; je suivais – ch’chuivais ; je serai – chrai ; je sens – chens et ainsi de suite). Rien d’exceptionnel ici donc.


Le passage de ui à u est beaucoup plus rare et mérite donc explication.

Pour commencer la prononciation chu (/ʃy/) est souvent associée aux Canadiens, mais elle s’entend aussi en France et Belgique (et donc, probablement, en Suisse).

Ensuite, elle n’est limitée à “je suis”. Voici les deux autres contextes dans lesquels je l’ai entendue ici, en Belgique :

  • Dans des pronoms, par exemple lui (“Je lui ai parlé” prononcé “J’u ai parlé”) ou celui (“celui-là” prononcé “çu-là”)

  • Dans les cas à un autre pronom intervient entre je et suis (“Je me suis rappelé” prononcé “Je m’sus rapplé”

Par contre, personne ne semble réduire “j’ai cuit” à “j’ai cu” ou “suivre” à “suvre” (d’ailleurs, “je suis” dans le sens de suivre ne se réduit jamais à chuis ou chu). Il y a donc quelque chose de spécial à propos de “je suis”. (j’y reviendrai plus bas)

Il y a trois manières de réduire une combinaison semi-voyelle + voyelle à une simple voyelle :

  1. supprimer la voyelle et transformer la semi-voyelle en la voyelle correspondante (/w/ – /u/ ; /ɥ/ – /y/ ; /j/ – /i/). Ce processus fonctionnerait pour les français de France et du Canada, où suis est prononcé /sɥi/, ce qui produirait donc bien /sy/ (su, qui deviendrait chu) par ce mécanisme. Par contre en Belgique, suis est prononcé /swi/, ce qui donnerait */su/ (sou, et donc chou), contrairement à ce qu’on observe. Ce n’est donc pas la bonne hypothèse.
  2. supprimer purement et simplement la semi-voyelle. C’est ce qui se passe en français de France et du Canada quand “puis” devient “pis” ou en français parisien quand “je lui” devient “j’y” (après suppression du schwa et du l). Bien entendu, cela donnerait chi et pas chu dans tous les dialectes du français, donc ce n’est pas non plus la bonne explication.
  3. “fusionner” la semi-voyelle et la voyelle. La seule différence entre i et u (/i/ et /y/ en API) est la forme des lèvres, étirées pour i et arrondies pour u. Pour transformer i en u il suffit donc d’un petit changement de prononciation. Et justement, les semi-voyelles /ɥ/ (FR, CA) et /w/ (BE) sont prononcées avec un arrondissement des lèvres. Il est donc tentant en prononçant /ɥi/ ou /wi/ de ne pas étirer ses lèvres pour la voyelle, ce qui donne /ɥy/ et /wy/. Lorsqu’on essaye de prononcer swu (/sɥy/ – /swy/), la semi-voyelle est presque inaudible et peut donc être supprimée sans impact pour la compréhension.

Cette dernière hypothèse me semble être la bonne.

En API l’évolution donne donc

/ʒœswi/ --> */ʒswi/ --> */ʃswi/ --> /ʃ:wi/ --> /ʃwi/
/swi/ --> */swy/ --> /sy/
/ʃwi/ --> */ʃwy/ --> /ʃy/

Ce qui explique l’évolution de “Je suis” en “Chus”


Reste à expliquer pourquoi cette réduction phonologique ne s’applique qu’au verbe être et à des pronoms. Ce n’est pas étonnant en ce qui concerne les pronoms, puisqu’il s’agit de clitiques ou d’affixes, qui sont prompt à ce genre de réduction. Qu’un phénomène ne touche que des mots phonologiquement réduits par nature et le verbe être, mais pas les autres verbes, est plus étonnant.

Deux hypothèses: soit “suis” et les pronoms, par leur plus grande fréquence, préfigurent d’une évolution phonologique future ; soit certaines formes du verbe être sont en train de devenir des clitiques, un peu comme les auxiliaires en anglais (Ch’malade ; T’pas cap ; Ç’ton chien, ça ?, etc.).

Malheureusement, je n’ai pas trouvé d’articles par des linguistes qui traitent de ce dernier phénomène en français, juste des commentaires d’internautes.


Pour ce qui est de l’orthographe, il n’y pas de norme, puisque le français normé s’est arrêté au 17ème siècle et la plupart des évolutions subséquentes sont considérées comme fautives (il suffit de lire quelques-uns des commentaires à cette questions dénonçant chuis et chu comme fautifs).

Perso, je préfère chu(s) à ch’u(s) vu qu’au point où on en est, il est illusoire de considérer je et suis comme deux mots distincts plutôt que deux morphèmes d’un même mot. Mais je doute fortement que quiconque viennent corriger une forme hors-norme par une autre qui l’est tout autant.

 

Leave a comment

What is the capital of Tunisia?